Rencontre paisible en terres hostiles [PV : Igor / Gretel]

En voyant le Saule Cogneur s’agiter au loin, il n’avait pas fallu longtemps à Igor pour réagir et s’y diriger. Un tel arbre était une mauvaise idée selon lui et ce qu’il garde aurait pu avoir une tout autre sorte de protection, plutôt qu’un tel colosse au mauvais caractère. Le Garde-Chasse lui-même ne s’y risquait pas à l’embêter, même si parmi ses clés, il était capable de “verrouiller” la sale attitude de cet arbre en l’immobilisant. Igor était arrivé assez vite sur place et il était accompagné par son fidèle toutou, son Terre-Neuve, son Spoutnik. Son chien était d’ailleurs le premier à s’être approché de la jeune fille à terre, afin de la renifler et d’apporter une présence rassurante face au saule toujours agité, même s’il était parvenu à se débarrasser en quelques coups de branche de ses gêneurs.
Igor avait rejoint Spoutnik aux côtés de celle-ci et pour parer à la différence de grandeur, il s’était agenouillé à côté d’elle pour qu’elle n’est pas besoin de se faire un torticolis en plus, afin de pouvoir s’adresser à lui. « Je peux ? » dit-il en tendant ses mains et en les positionnant de sorte à attraper le lapin téméraire.

Le Garde-Chasse n’avait pas son attitude timide habituelle. Sans doute à cause de cette petite montée d’adrénaline ou bien parce qu’un animal et une petite sorcière étaient tous deux blessés devant lui. Mes béquilles sont là-bas. Cela faisait beaucoup à gérer en si peu de temps, mais l’individu cornu semblait très bien s’en sortir. Il avait une façon logique de penser et ordonné méthodiquement ses tâches. Il fallait d’abord protéger et sécuriser, avant de songer à soigner et à faire connaissance. De ce fait, Ingward avait sorti sa baguette et sans prononcer un mot, lança un sortilège sur l’arbre. L’effet était semblable à un sortilège de somnolence, puisque le Saule Cogneur s’était soudainement arrêté de frapper partout et de s’agiter, comme s’il venait de s’assoupir et il ne bougeait plus.

« Accio béquilles. » La voix du Garde-Chasse perce à nouveau et les béquilles s’exécutent. Elles reviennent vers lui et rejoignent la jeune fille. Le Terre-Neuve noir songe même à tenter de les attraper, les confondant avec des bâtons en bois pour jouer, avant que Igor lui sourît et lui face un signe de négation. Tout ceci, alors que de sa main libre, il portait le petit lapin tacheté.

Une fois le calme revenu, il pouvait dorénavant se concentrer sur cette personne. Le danger était écarté, après tout. Ou du moins, endormi. « Eh bien, en-enchanté Gretel. M-moi c’est Ingward Witoslaw, le garde-chasse de Poudlard. Mais tu peux m’appeler Igor. » Il ne range pas immédiatement sa baguette et la coince plutôt entre ses dents, afin de pouvoir avoir sa deuxième main de libre. Avec une infinie précaution, il ausculte l’oreille du lapin et fait un hochement de tête pour signifier à Gretel qu’elle avait vu juste. « J-je peux lui arranger ça. À condition qu’il reste sage p-pendant quelque seconde. » dit-il en ayant libérer ses dents de sa baguette et en l’ayant reprise en main. Ce n’était pas la première fois qu’il utilisait le sortilège Repousse-Os sur un animal, mais pour aider celui-ci et limiter la douleur, il préférait toujours replacer le membre à son état d’origine avant de l’exécuter.

Un dernier coup de baguette donc pour remettre l’oreille de Lindt en place. En revanche, il ne semble pas vouloir utiliser la magie pour réparer cette béquille. « Je … Je peux te la réparer aussi, mais je dois aller dans m-mon atelier… » Il pose le lapin sur le dos de Spoutnik et confit donc à son chien la garde du petit animal. Le Terre-Neuve n’avait pas l’air mécontent. Il était même plutôt aux petits soins pour lui. « Est-ce que tu … Tu peux marcher ou t-tu veux que je te porte ? »

La façon de parler de Gretel, s’il se fiait au nom donné par celle-ci, était très révérencieuse. S’en était perturbant, voir gênant, pour celui qui avait été banni de ce milieu. On jurerait presque qu’il était en train de rougir. Igor s’enforça néanmoins à garder un minimum de tenu et de rester concentré sur sa tâche du jour. « Enchanté Gretel. Eh bien, euh… » Le remercier ? De quoi ? De l’avoir empêché de se faire tuer ? C’est la moindre des choses. Il ne tient pas à avoir une mort sur la conscience. Une mort idiote, qui plus est. « Je dirais ; En ne t’approchant plus de cet arbre à l’avenir. Pas toute seule en tout cas. Il n’est pas là par hasard et tu t’en es plutôt bien tiré. Cela aurait pu être bien pire. » Ses jambes broyées, par exemple. Ce n’est pas d’une paire de béquille dont elle aurait eu besoin à l’avenir, mais plutôt d’un fauteuil roulant.

Elle semblait néanmoins se débrouiller toute seule. Igor s’évertua à ne pas marcher trop vite, autant pour qu’elle ne le perde pas de vue que pour qu’elle ne se fatigue pas plus que de raisons.

Parfois il s’arrêtait même, alors que Spoutnik continuait sa route, dirigé par un lapin à nouveau en forme. Le chien couinait parfois, quand Lindt lui tirait un peu trop fort sur ses oreilles et il remercia du regard la Gryffondor lorsqu’elle rabroua son propre animal de compagnie.
Cette petite troupe était arrivée lentement, mais sûrement, jusqu’à la cabane du garde-chasse. Une très modeste demeure, pour ne pas dire une bicoque, qui lui plaisait tout particulièrement. Plus c’était petit, moins c’était tape-à-l’œil et donc, plus c’était discret. La question avait surpris Igor, qui aimait beaucoup son métier. « P-parce que je l’ai choisi et … Ça me plaisait bien. » Igor était bien trop pris au dépourvu pour parvenir à formuler une réponse correcte. Il improvisait et son improvisation était gâché par le malaise.

L’intérieur de sa propre maison a un effet bénéfique sur sa nervosité. Une fois dans son cocon, celle-ci baisse, ce qui lui permet de peaufiner sa réponse, alors qu’il désigne de la main une chaise sur laquelle Gretel peut s’asseoir. « J-je ne peux pas me permettre de faire le difficile. Je n’ai pas réussi à devenir un médicomage et j-j’ai beaucoup de mal avec les gens. Leurs regards surtout. Alors, qu-quand j’ai appris que le précédent garde-chasse s’en allait, j’ai sauté sur l’occasion. Au moins ici, j-je peux m’isoler. »

Tout en s’expliquant, Igor sort son service à thé et fait bouillir de l’eau. Le temps que celle-ci chauffe, il avait sorti une boite de gâteau en métal et l’avait posé sur la table, devant Gretel. « Sers-toi. Tu veux du thé ? » Ses interrogations étaient bien plus innocentes, mais lui n’allait pas se priver pour en boire. Surtout qu’il voulait essayer un tout autre genre d’infusion. C’est Kesha qui lui avait donné l’idée. S’il parvenait à faire de la confiture à la citrouille, pourquoi du thé aussi, hm ? Il ne comptait pas utiliser Gretel comme d’un cobaye, alors il en avait d’autres sous la main, plus conventionnels pour la jeune fille, si elle désirait en boire.

Igor avait failli louper son service, à cause de la question.
Une demi-licorne ? En voilà une nouvelle version pour le moins ; étonnante. Imaginative !

« Oui. Enfin ; Non, je ne suis pas un … demi-licorne. Je n’ai rien avoir avec elle. Si ce n’est que je les nourri parfois. » Il s’embrouille tout seul. « Mais oui, c’est à cause d’elle. Ce n’est pas très … commun et c’est souvent pointé du doigts. J-je n’aime pas trop ça. C-c’est une longue histoire et ce n’est pas très joyeux à entendre. Je n’aime pas trop non plus la raconter. » Une demi-licorne. C’est tout aussi original que la tentative de se transformer en dragon, mais à choisir, c’est moins sale que la métamorphose loupée. Il ose à peine imaginer quelle sordide histoire pourrait donner naissance à un tel hybride.

Avant de toucher à son thé, il était allé à son atelier, à l’extérieur. Il y avait juste un toit de fortune qui l’abritait d’une pluie, inexistante ce soir et une fenêtre donnée sur l’intérieur. Elle était ouverte, ce qui permettait à Igor d’avoir encore dans sa ligne de mire Gretel et son gouter. « Pourquoi as-tu besoin de ces béquilles ? » Elle ne s’était pas privée de l’interroger sur sa corne, pourquoi le ferait-il sur ses jambes ? D’autant qu’il est assez curieux à ce sujet, voir inquiet et qu’il y voit une occasion de détourner la conversation.

Loin de se douter des mésaventures passées de Gretel, une franche interrogation se mit à briller dans son regard orangé. « Pourquoi fuir les dragons ? » Ingward les : A-DO-RÉ. S’il fuit les autres sorciers ou tout autre individu humanoïde, jamais il ne tournera le dos à un dragon. À une quelconque créature d’ailleurs, mais plus spécifiquement les dragons. Le garde-chasse était si troublé, qu’il en oublie son œuvre. Il se remit d’ailleurs très vite au travail et de loin, Gretel pouvait avoir l’impression qu’il peignait quelque chose. Ce qui n’était pas vrai, mais tout à fait faux non plus. Une colle à bois s’applique de la même manière qu’une peinture, à la différence près qu’il faut moins de quantité et plus de minutie.
Le papier à poncer ne l’empêchait pas d’écouter cette histoire. « Non, elle… Elle ne me dit rien. » Ses parents, son père particulièrement, n’étaient pas le genre d’individus à raconter des histoires pour endormir leur enfant. Les chances passaient à nuls, si celles-ci étaient d’origine moldu.

Ce n’était pas un grand problème en soit, puisque Gretel combla très vite cette lacune. Ainsi donc, la jeune est empoisonnée et malade. Tout comme lui. Cette triste similitude lui fit faire une esquisse compatissante, en l’entendant relativiser, mais avec toute de même une touche d’amertume. « Je ne sais pas si c’est vraiment de la chance. Qu’est-ce qui t’a empoisonné ainsi ? » C’était un cas unique, alors ça l’intéressait. C’était une curiosité plutôt macabre et c’est dans ces moments qu’on peut trouver sur quoi deux individus totalement opposés, comme Grishin et Witoslaw, ont pu s’entendre à une époque.

« Si tu ne veux pas en parler, tu peux me le dire de vive-voix. Je suis … Très bien placé pour comprendre qu’on n’est pas nécessairement envie de parler de ce genre de chose. » Brièvement, il pointe de son index crassé, recouvert d’un mélange d’eau, de colle et de copeaux, vers cette fameuse corne qui avait intrigué auparavant Gretel.

Il avait d’ailleurs terminé de réparer sa béquille. Le sort de ce Saule Cogneur semblait intrigué la petite fille, de ce qu’il en entendait en se lavant les mains et en donnant un coup de chiffon sur la canne pour lui rendre quelque chose de propre en mains tout aussi propre.

Igor avait le tour de sa maison et il était rentré à l’intérieur. Tout en se faisant, il avait repris la parole pour ne pas laisser ses interrogations sans réponse. « Non, il n’est pas ensorcelé. C’est dans la nature de son espèce d’être aussi virulente et violente. À la base, ils ont pris cet aspect colérique pour se protéger des oiseaux, afin qu’ils ne viennent pas nicher dans leurs branches ou faire des troues dans leur écorce. Lui, il garde un passage vers un endroit encore plus dangereux. C’est sa mission. Nous sommes aux petits soins pour lui et il apprécie. » Cet arbre caractériel a une manière assez ferme et fracassante de leur rendre la pareille, mais il n’est pas aussi malheureux que Gretel semble le croire. « Tiens, ça devrait tenir si tu ne te bagarres pas à nouveau. » lui dit-il, alors qu’elle lui tend sa béquille réparée et qu’il retourne s’asseoir pour savourer son propre thé. Tiède.